La catastrophe des Ponts-de-Cé du 4 Août 1907

Publié le par MClaude

La catastrophe des Ponts-de-Cé du 4 Août 1907

Le train arrivait sur le pont. La machine venait de s'engager entraînant derrière son convoi de voyageurs, jeunes gens joyeux, familles se rendant à de gaies parties de campagne.
Un horrible craquement se fit entendre. Le tablier du pont a cédé. La machine tombe dans le vide et va s'abattre au pied de la première pille.
Enorme masse, elle entraîne derrière elle son tender, le fourgon du chef de train, le premier wagon de voyageurs. A ce moment, le convoi se rompit et cette rupture sauva le reste du convoi.

La panique
Un moment d'indescriptible angoisse succède aux chants et aux rires. En quelques secondes les wagons restés sur le pont et la rampe qui le précède sont vides de leurs voyageurs affolés. Ceux du wagon C X 2569 doivent opérer une véritable gymnastique pour, les portières ouvertes, se glisser le long des marchepieds et gagner la voie de terre ferme.
Le chauffeur Leclair, le premier, a vu le danger. D'instinct il se précipite avant le train dans la Loire et, excellent nageur, réussit, quoique blessé, à gagner la rive.
Le mécanicien tombe avec sa machine et celle-ci, le recouvrant en se renversant, l'ensevelit dans le fleuve.

Les causes de l'accident
Après un minutieux examen de toutes les pièces, la première commission d'enquête a attribué à la dilatation des rails par la chaleur la terrible catastrophe.
Quelques instants après le passage du train de 11 heures qui se dirigeait vers Angers, plusieurs employés avaient remarqué le manque d'écartement entre les rails. Il se peut que 30 minutes plus tard, à la suite de la rupture d'un coussinet brisé sous l'action du soleil, les rails se soient arcboutés, relevés et faussés.
C'est à cela qu'il faudrait attribuer le déraillement de la locomotive en avant du pont, puis de la rupture du tablier.
L'idée de malveillance a été écartée. Il y a dès maintenant une chose établie, c'est que les freins à air ont parfaitement manoeuvré, au moment précis de la rupture du convoi qui s'est produite entre le premier et le deuxième wagon des voyageurs. Grâce à cette circonstance, le reste du convoi a dû de n'être pas précipité dans le fleuve.

Les responsabilités
Il serait téméraire d'aborder dès aujourd'hui le chapitre des responsabilités. Disons cependant qu'en 1893 un accident du même genre — moins grave toutefois, puisqu'il n'y eut pas mort d'homme et qu'il s'agissait d'un train de marchandises— provoqua une réparation du pont. Cette réparation fut faite sur les trois « passées » du côté de Brissac, mais on ne toucha pas, malgré les rapports réitérés d'un chef de section autorisé, mort maintenant, à la partie du pont regardant les Ponts-de-Cé.
Ce pont, qui a une longueur de 318 m., a été construit en 1876 et non modifié depuis. II était construit pour des trains marchant à faible allure et non pour des trains marchant aux allures actuelles.

La visite du ministre
M. Barthou, ministre des travaux publics, avec MM, Lillez et Babaud, attachés à son cabinet, est arrivé lundi matin sur le lieu de la catastrophe et s'est ensuite rendu aux Ponts-de-Cé où il a trouvé, à la Mairie, M. le maire Dolbois et M. Roger de Terves, conseiller général du canton.
Accompagné de M. Ferdinand Bougère, député, du préfet et du directeur général des Chemins de fer de l'Etat, il est allé visiter les blessés à l'hôpital des Ponts-de-Cé et dans les maisons particulières où certains d'entre eux avaient été recueillis, notamment chez M. Allard, secrétaire du Syndicat agricole de l'Anjou, et chez M. Chaviller.
M. le ministre a prodigué ses encouragements aux blessés dont plusieurs ont pu repartir dés aujourd'hui ; et il a chaleureusement félicité les personnes bienfaisantes qui leur avaient donné l'hospitalité. Il est ensuite retourné à la Mairie pour saluer les morts et il a exprimé à M. Dolbois toutes ses félicitations pour le dévouement et l'activité avec lesquels il a accompli jour et nuit les devoirs si délicats inhérents à son mandat de maire.
Puis, ces messieurs se sont rendus de nouveau sur le lieu de la catastrophe où ils ont appris que sept voyageurs partis de Sorges, et non compris dans les listes pubiées le matin, n'avaient pas encore été retrouvés.
Ils étaient attendus par le haut personnel de l'administration des chemins de fer de l'Etat qui dirigeait les divers travaux.
Le ministre a remercié les officiers et les soldats qui aident aux recherches et dégagent la voie et le fleuve.
Il a assuré les personnes présentes de sa sollicitude pour les familles des victimes de l'accident et pour tous ceux qui se sont signalés dans le sauvetage.
Après un examen attentif de l'étal du train et du pont, M. le ministre et les autorités qui l'accompagnaient sont revenus par un train spécial qui les attendait sur place et sont arrivés à Angers à 11 h. 1/2.
M. Barthou a quitté Angers par le rapide.
Il est absolument apparent que le pont a été construit bien trop légèrement; il est d'ailleurs à remarquer que ce n'est pas le métal du tablier qui s'est rompu, mais que ce sont les boulons qui ont cédé. Détail qui a son importance : du côté aval de la voie, il manque un coussinet juste à l'endroit où s'est produite la première courbure du rail.

L'Echo Saumurois, mercredi 7 Août 1907 - Photo "Ouest France"

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R
Mon grand-père maternel Alexis Turbelier,(paroisse de La Madeleine d'Angers) qui travaillait chez un notaire d'Angers mais le week-end étant comédien connu en Maine-et-Loire, devait prendre ce fameux train dont on m'a beaucoup parlé dans mon enfance angevine. Heureusement, il était en retard et le train était déjà parti... Lui en a sans doute réchappé..
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M
Une chance pour lui !